Dans la nuit du mercredi 24 au jeudi 25 avril 2019, le cyclone tropical Kenneth est passé à proximité de l’archipel des Comores, affectant principalement l’île de Grande Comore et dans une moindre mesure celles d’Anjouan et de Mohéli.

Au vu du nombre conséquent de personnes affectées (au moins 7 personnes décédées, 200 blessées et plus de 41 000 personnes affectées), la Croix-Rouge française, via la PIROI, est intervenue pour fournir un appui technique et logistique à l’opération du Croissant-Rouge comorien afin de venir en aide aux sinistrés.

MaudeTémoignage de Maude, Responsable des opérations de distribution aux Comores durant le premier mois de l’opération :

 

Quels étaient les besoins des populations après le cyclone ?

Les besoins prioritaires concernaient l’hébergement, l’alimentation, l’accès à l’eau potable et l’électricité (puisque l’électricité a été coupée pendant plusieurs jours dans certaines zones).

 

 

Quel a été ton rôle, en tant que Responsable des opérations de distribution ?

Tout d’abord, mon rôle était de m’assurer de la bonne mise en œuvre de l’opération sur le terrain. Je devais veiller à ce que les engagements pris auprès de la population et de nos donneurs soient respectés.

Ensuite, j’étais chargée de coordonner l’action des volontaires, la préparation logistique et les ressources humaines nécessaires aux distributions sur le terrain.

Enfin, je devais m’assurer que chaque bénéficiaire ciblé comme vulnérable reçoive bien son matériel.

 

Peux-tu nous expliquer comment se déroule une distribution ?

Une distribution se déroule toujours sur deux jours. La première journée est dédiée à l’identification des bénéficiaires, et la seconde à la distribution des kits.

La veille de la distribution, les bénéficiaires sont identifiées selon certains critères, puis nous leur remettons un ticket et leur indiquons l’heure de la distribution.

Le lendemain, les camions acheminent les kits à distribuer jusqu’au lieu de distribution. Une fois le stand de distribution mis en place, les bénéficiaires sont accueillis sur présentation de leur ticket au point de contrôle et par ordre de priorité (les femmes enceintes et les personnes handicapées sont prioritaires). Ensuite, le responsable de famille inscrit son nom sur le registre, avant de recevoir le kit.

Le bon déroulement des distributions est garanti par les volontaires dont les rôles sont définis à l’avance : sécurité, logistique, accueil, remise de kits, observation (dont le but est d’améliorer le processus de distribution au fur et à mesure).

 

Quel type de biens avez-vous distribué ?

La PIROI a fourni des kits d’abris d’urgence (composés d’une scie, d’une machette, d’un marteau, de vis, de corde, de fil de ligature, etc), ce qui a permis aux familles de commencer à reconstruire leur habitation dès le lendemain de la distribution. C’est de la petite construction, certes, mais cela les a beaucoup aidé. Toutefois, il y a encore aujourd’hui des familles déplacées, sans hébergement.

De plus, les jerrycans distribués par la PIROI leur ont permis d’avoir de l’eau potable et ainsi d’éviter la diffusion d’épidémies. Le Croissant-Rouge s’est chargé de la distribution alimentaire, via le Programme Alimentaire Mondial (PAM).

Il était aussi nécessaire de prévenir les maladies vectorielles telles que la dengue, c’est pourquoi la PIROI a distribué des moustiquaires aux populations sinistrées.

La composition des lots a été adaptée aux zones de distribution. Chaque lot comprenait 1 kit cuisine et 2 savons. Le reste du lot a été adapté aux régions : dans les zones Nord et Ouest, il comprenait également 2 bâches, 2 moustiquaires, 1 jerry can, 1 seau, 1 kit d’abris d’urgence et 1 lampe solaire portable (qui s’est avérée très utile pour les bénéficiaires dont l’électricité a été coupée). Les habitants des zones Sud et Est se sont vu distribuer 1 matelas, 1 réchaud, 1 lampe pétrole et 2 nattes, en plus du lot de base. Une aide à la pose et la fixation de taule est prévue dans les semaines à venir.  

 

D’où provient le matériel distribué ?

Une grande partie du matériel provient des stocks de contingence de la PIROI dans la zone. Les entrepôts PIROI des Comores, de Mayotte et de La Réunion ont été mobilisés sur cette opération. Enfin, certains articles ont été achetés localement.

Cette opération est rendue possible grâce au soutien logistique des FAZSOI et à l’engagement financier de l’Union Européenne (DG ECHO), de USAID, du département de la Réunion, et des communes réunionnaises du Tampon et de Saint-Denis.

 

Combien de distribution avez-vous organisé et où ont-elles eu lieu ?

Les trois îles ont été couvertes par les distributions. Au total, nous avons organisé des distributions dans 105 villages à Ngazidja (Grande Comore), 15 à Mohéli et 14 à Anjouan.

Opération Kenneth Comores

Peux-tu nous donner une idée du nombre de bénéficiaires ?

A ce jour, nous avons déjà distribué des kits à 1 310 familles (ce qui représente environ 6 550 personnes). Il nous reste encore 191 familles à rencontrer dans les prochains jours.

 

Combien de personnes l’opération a-t-elle mobilisée ?

Au total, les distributions ont mobilisé 120 bénévoles. Sur le terrain, nous étions également deux salariés : Abdou Mohamed El Arif, le logisticien, et moi-même. Par ailleurs, tous les salariés Croissant-Rouge ont contribué à ces distributions, en y étant impliqué à différents niveaux en fonction de leurs responsabilités.

 

Quelle a été la principale difficulté rencontrée lors de ces distributions ?

C’est une question difficile, d’autant plus que je manque peut-être un peu de recul, je viens tout juste de terminer ma mission. Je pense que la principale difficulté est d’être en mesure de limiter le sentiment d’injustice des non-bénéficiaires. Il faut être capable de diffuser nos critères de sélection des bénéficiaires et de faire comprendre que nos stocks ne peuvent couvrir la totalité des besoins de la communauté comorienne.

 

Quels sont les défis auxquels la population des Comores va devoir faire face dans les semaines/mois à venir ?

Je pense que deux principaux défis nous attendent :

Premièrement, il va falloir renforcer le secteur alimentaire : l’agriculture a été sévèrement touchée et le secteur animalier n’est pas très développé en Union des Comores.

Deuxièmement, des projets de gestion des risques et des catastrophes sont à mener sur le long terme. Il est impératif de sensibiliser la population sur les risques naturels de la zone, et de construire des habitations plus résistantes aux intempéries*.

 

 

∗La Croix-Rouge française, en partenariat avec le programme INTERREG V (Union Européenne), l’Agence Française de Développement, le département de Mayotte et le fonds de Coopération régionale de Mayotte, met en place, à partir de juillet 2019 un projet régional de gestion des risques de catastrophes à Mayotte et en Union des Comores. Dans le cadre de ce projet qui sera mis en place sur 3 ans, les équipes de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge contribueront à renforcer la résilience des populations de tout l’archipel des Comores par la sensibilisation et la préparation aux catastrophes.